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Archive for the ‘Histoire de France’ Category

Voici ci-dessous des extraits choisis et des micro-résumés de certaines portions de l’ouvrage de Bruno Dumézil intitulé Des Gaulois aux Carolingiens (-50 av. J.-C.–888), Presses universitaires de France, Paris, 2013, 232 p. Je recommande fortement l’ensemble de cet excellent opuscule. C’est la meilleure référence sur le Haut Moyen Âge que j’ai consulté ces dix dernières années. Académiquement très solide mais littérairement très accessible.

Carte administrative de l'Empire carolingien

Carte administrative de l’Empire carolingien [AGRANDIR]

CONTINUITÉ DE L’ÉRUDITION ENTRE L’ANTIQUITÉ ET LE HAUT MOYEN ÂGE

« Alors que les quatre siècles de paix romaine n’avaient pas produit un seul grand auteur en Gaule, l’époque suivante voit se multiplier les belles plumes. Pour l’Antiquité tardive, on note des écrivains majeurs comme Ausone, Sulpice Sévère, Hilaire de Poitiers ou Prosper d’Aquitaine ; puis, à partir du VIe siècle, apparaissent de grands narrateurs d’histoire comme Grégoire de Tours ou Frédégaire, comparables par certains aspects à ceux de l’Antiquité[1]. »

(suite…)

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CardinalRichelieu1

Glané dans le documentaire Secrets d’histoire : Cardinal de Richelieu : le ciel peut attendre

CardinalRichelieu2

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Par Thomas Babington Macaulay (1800-1859).

Via Roman Roads Media.

Inspiré par la Bataille d’Ivry (14 mars 1590).

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Du même thème sur Le Monarchomaque :

Et hors-site : Le génocide de Vendée > Série d’articles [Phileo Sophia]

Docu-film sur la Guerre de Vendée (1793-1796) qui s’est aussi étendue dans le Poitou, l’Anjou, le Maine et la Bretagne :

La guerre ouverte n’a pas eu lieu que dans le nord-ouest, mais aussi dans le sud-est : les armées sous les ordres des Montagnards de Paris assiégèrent la cité de Lyon du 9 août au 9 octobre 1793 (44 000 obus tirés sur la ville, 2816 morts du côté  lyonnais — 940 pendant les combats et 1876 pendant la répression jacobine) et assiégèrent la cité de Toulon du 18 septembre au 18 décembre 1793. De plus, il y eut une brève insurrection royaliste dans le Gévaudan (clic et clic).

Girondisme 1793

Révolte girondine (fédéraliste) en 1793 — Les autorités de 60 départements sur 83 refusent de reconnaître le coup d’État montagnard (jacobin) du 22 juin 1793. À Caen, une armée de 4000 hommes est organisée pour marcher sur Paris.

Département d'Occitanie ayant juridiquement fait sécession en 1793 (source)

Départements d’Occitanie ayant juridiquement fait sécession (s’étant déclarés en état de guerre contre la Convention jacobine de Paris) en 1793 (source).

BilanTerreurOccitanie

Bilan de la terreur en Occitanie (source).

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Dernière mise-à-jour : 5 juin 2017.

Boissy d’Anglas saluant la tête du député Féraud (20 mai 1795), par Alexandre-Évariste Fragonard, 1831

Boissy d’Anglas saluant la tête du député Féraud (20 mai 1795), par Alexandre-Évariste Fragonard, 1831.

Rabaut St-Étienne, par Jacques-Louis David, 1791.

Rabaut St-Étienne, par Jacques-Louis David, 1791.

Alba-Lasource, dans Louis Blanc, Histoire de la Révolution française, Langlois & Leclercq, 1847.

Alba-Lasource, dans Louis Blanc, Histoire de la Révolution française, Langlois & Leclercq, 1847.

Buste de Boissy d’Anglas, Musée de la salle du jeu de paume, Versailles

Buste de Boissy d’Anglas, Musée de la Salle du jeu de paume, Versailles.



« Les élections ne doivent jamais avoir lieu excepté si Dieu préside au-dessus d’elles par son Saint-Esprit ! »
— Jean Calvin, 1583 (publication posthume)

« Le clergé n’est pas la nation ; il est le clergé. […] La noblesse n’est pas la nation, mais la partie décorée de la nation. […] Il est évident que le Tiers-État est la nation, moins la noblesse et le clergé. »
— Rabaut St-Étienne, 1789

« Il faut que Paris soit réduit à un quatre-vingt-troisième d’influence comme chacun des départements. »
— Alba-Lasource, 1793

« Enfants de Coligny, pourriez-vous être amis des rois ? Auriez-vous oublié la St-Barthélemy et les dragonnades ? »
— Tract de la Société populaire de Nîmes, été 1793

« C’est le jour de vengeance et nous l’attendons depuis plus de cent ans. »
— Jeanbon St-André, 1793

« Comme Jérusalem, Paris a tué les prophètes. »
— Jules Bonnet, 1889, au centenaire de la Révolution


CarteContreRevolution1793

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Le IIIe Reich en 1942

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Résumé de l’article Les protestants français dans l’entourage du général de Gaulle (Bulletin de la Société de l’histoire du protestantisme français) :

L’importance des protestants français dans l’entourage du général de Gaulle durant la Seconde Guerre mondiale est précisée à travers l’historiographie récente et des archives inédites, notamment celles du cabinet du général de Gaulle. 5% des membres des Forces Françaises Libres (F.F.L.) sont protestants et 2.5% des Compagnons de la Libération, pour une minorité évaluée à 1.8% des Français ; ces ralliés à la cause de la France Libre appartiennent plutôt à la haute société protestante, surtout parisienne. Le parcours de vingt personnalités protestantes auprès du général de Gaulle, à Londres et à Alger surtout, démontre toute la diversité des attitudes envers le chef de la France Libre : les inconditionnels, les déçus, les ralliés et les antigaullistes.

Pour d’autres informations sur les calvinistes dans les F.F.L. et la Résistance, voir la deuxième partie de cet article :

Le protestantisme français peut-il mourir ? Jamais ! [Le Monarchomaque]

Pour mettre les choses en perspective (et mesurer le degré d’orthodoxie de ces protestants situés entre la Réformation et la Postmodernité), je propose cette allocution prononcée par l’économiste Charles Rives (1874-1955, fiche sur l’ASMP, œuvres sur Mises Institute) à l’Assemblée du Désert de 1945 dans le hameau du Mas Soubeyran (Gard, Languedoc) :

« Les vivants n’ont pas démérité les morts »  [Réforme]

Le général de Gaulle passant en revue une unité des F.F.L.

Le général de Gaulle passant en revue une unité des F.F.L.

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poster-voltaire

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Référence : Xavier MARTIN, Voltaire méconnu — Aspects cachés de l’humanisme des Lumières (1750-1800), Poitiers, Éditions Dominique Martin Morin, 2007, pages 201 à 204 sur 350.

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La tolérance selon Voltaire : retour sur l’affaire Calas

Faire le tolérant ostensiblement et mépriser par-devers soi, ou entre amis sélectionnés : voilà pour Voltaire une ligne de conduite, sinon quasiment une règle de conduite. Non sans délicatesse il donna la recette à Mme du Deffand [1], et d’avoir déféré à son téléguidage elle se félicitait, écrivant à l’orfèvre [Voltaire] en matière de mépris : « Je répète sans cesse ce que vous m’avez dit dans une de vos lettres, qu’il faut mépriser les hommes et qu’il faut les tolérer ». Elle ajoutait, à la lumière de l’expérience : « [C]e qui est de singulier et d’heureux [sic], c’est qu’ils sont contents de la tolérance, et ne s’aperçoivent point du mépris, on aurait donc grand tort de n’en point user ainsi. » [2].

Remarque utile : la fameuse tolérance voltairienne est confirmée comme idéal, mais replacée en perspective. Il est à savoir qu’elle roule en tandem avec le mépris. C’était à supposer, mais on pouvait bien ne pas présumer que l’humaniste en eût tiré un principe clair. Notable occurrence, cette indiscrétion de Mme du Deffand survient en fin d’affaire Calas, un an après le Traité sur la Tolérance (1763) [de Voltaire]. Tolérance et mépris. Tolérer, mépriser : l’on songe à Voltaire disant par-derrière, de la veuve Calas, qu’elle « est une petite huguenote imbécile », dans une phrase que censure Condorcet en trop pieux éditeur de sa correspondance [3]. Et Voltaire récidive, recommandant Mme Calas à d’Alembert, en le prévenant : « C’est une huguenote imbécile » [4]. Il est donc à souhaiter « qu’elle se montre peu » pour l’efficacité du battage d’opinion [5]. Et il vaudra mieux, par compensation, « il faudra surtout que ce soit un homme intelligent qui la conduise chez [les juges] en grand deuil » [6].

De l’opportunité que cette « imbécile » ne se montre guère, le philosophe veut contribuer à la convaincre. C’est négligemment sous la signature de son secrétaire, et en arborant sa titulature de « comte de Tournay » qu’il se donne la peine de l’en persuader [7] : nous le savons « d’une autre nature que les sots » [8], donc que les petites huguenotes imbéciles. Et Calas n’était qu’un marchand d’étoffes ; Voltaire méprise les gens de métier. Tous les Calas au demeurant, dans la coulisse, sont aussi taxés d’imbécillité : « Les Calas sont, comme vous l’avez peut-être déjà ouï dire, des protestants imbéciles […] » [9]. Ils ont même été « assez imbéciles » pour se contredire et se parjurer [10], ce dont il convient d’estomper la trace, et Voltaire s’y emploie : il ment par omission lorsqu’il relate l’affaire, il le fait même fort benoîtement dans le chapitre premier de son Traité de la Tolérance. Il le faut bien pour compenser la maladresse de cette nichée de « protestants imbéciles », dont la mésaventure est surtout, à ses yeux, le combustible d’une campagne d’opinion. Le mensonge actif y pourvoit aussi, puisqu’il convient en aparté, cinq ans plus tard : « Les juges des Calas ont été trompés par de faux indices », moyennant quoi « le meurtre des Calas est une action très pardonnable » [11]. La vérité oblige à dire qu’il en a toujours été convaincu. « J’ai toujours été convaincu qu’il y avait dans l’affaire des Calas de quoi excuser les juges » [12], ces juges que pourtant, obsessionnellement, il ne cessait d’appeler « assassins en robe noire ». Les spécialistes de Voltaire, et notamment de l’affaire Calas, entretiennent sur ces points du dossier un silence oppressant.

[…]

Très peu avant de s’engager dans les voies glorieuses de l’affaire Calas, Voltaire se moquant du pasteur Rochette qui encourait la mort et allait la subir, conseillait désinvolte au duc de Richelieu de le laisser condamner pour obtenir sa grâce et par là même se faire « l’idole de ces faquins de huguenots », en ajoutant avec cynisme : « Il est toujours bon d’avoir pour soi tout un parti » [13]. Après son plein succès dans l’affaire Calas, l’homme de Ferney fait cette confidence au même Richelieu : « Je conviens de tout ce que vous me dites sur ces plats huguenots et sur leurs impertinentes assemblées. Savez-vous bien qu’ils m’aiment à la folie et que si j’étais parmi eux j’en ferais ce que je voudrais ? » [14] Les méprisés voient la tolérance et non le mépris ; on aurait tort effectivement de se gêner puisque ça marche.

Dans tout cela l’émouvante effusion d’humanisme est donc à relativiser. Elle rétrécit jusqu’à l’infime lorsqu’on mesure mieux, en de tels dossiers, la part du mépris volontiers cynique, et celle de l’utilitarisme idéologique. Peu d’années après, le patriarche refuse de s’engager pour la mémoire et la famille d’un malheureux Martin, roué par erreur certaine. Ce n’est qu’un catholique, au patronyme somme toute assez banal. Un « petit catholique » ? En tout cas « imbécile », au moins par hypothèse. Voltaire décrète, à son sujet : « Je ne peux pas être le don Quichotte de tous les roués et de tous les pendus » [15]. Il forme l’hypothèse, ici libératoire : « Il se peut que Martin fût un imbécile qui ne sut pas se défendre » [16] ; bref, une sorte de Calas, mais non protestant. Il n’y aura pas d’affaire Martin.

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Notes infrapaginales

[1] Lettre de Voltaire à Mme du Deffand, 11 octobre 1763.
[2] Lettre de Mme du Deffand à Voltaire, 14 mars 1764. Semblable allusion de la même au même le 14 janvier 1764, quant à la perte du bon goût : « Que faire à cela ? prendre patience, et comme vous le dites, mépriser les hommes et les tolérer. »
[3] Lettre de Voltaire aux d’Argental, 14 septembre 1762.
[4] Lettre de Voltaire à d’Alembert, 28 novembre 1762.
[5] Lettre de Voltaire à Debrus, vers le 7 août 1762.
[6] Ibidem.
[7] Lettre de Voltaire à Mme Calas, 14 septembre 1762 ; signé « Wagnière, secrétaire de M. de Voltaire, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, comte de Tournay ».
[8] Ibidem.
[9] Lettre de Voltaire à d’Argence, 21 août 1762 ; « […] des protestants imbéciles que des catholiques un peu fanatiques ont fait rouer à Toulouse ».
[10] Lettre de Voltaire à de Lacroix, 4 septembre 1769.
[11] Lettre de Voltaire à Hénault, 14 mars 1768. La condamnation de Callas est « très pardonnable » par rapport à « l’assassinat juridique » de Servet par Calvin [sic], lequel Calvin était « le plus malhonnête fanatique qui fût en Europe ». « Il n’y avait pas dans le parti opposé [donc côté catholique] un homme plus haïssable que lui [Calvin] ».
[12] Lettre de Voltaire à de Lacroix, 4 septembre 1770.
[13] Lettre de Voltaire à Richelieu, 27 novembre 1761.
[14] Lettre de Voltaire à Richelieu, 28 octobre 1766.
[15] Lettre de Voltaire à d’Argental, 30 août 1769.
[16] Lettre de Voltaire à Dompierre d’Hornoy, 20 décembre 1769.

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« Écrasez l’Infâme »

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La célèbre formule conclut les lettres de Voltaire au fidèle Damilaville (1723-1768) à l’époque de l’affaire Calas. Pour le philosophe, « l’Infâme », désigne aussi bien les calvinistes que les catholiques : n’a-t-il pas été en butte aux tracasseries du Consistoire de Genève à propos des représentations théâtrales des Délices ? Et le sort du pasteur Rochette, pendu à Toulouse en février 1762, ne l’a pas particulièrement ému.
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Référence : François Marie Arouet dit Voltaire (1694-1778) [Exposition sur le siècle des Lumières – Bibliothèque nationale de France (BnF)]
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Enquête sur le massacre de masse planifié et systématique de plus de 150 000 habitants de la Vendée par l’État français pendant la Révolution :

(fichier documentaire alternatif)

Voir aussi :

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Dragonnades

Représentation des dragonnades dans un ancien manuel scolaire français (début XXe siècle)

L’histoire de l’humanité est jalonnée de progrès et de régressions. Le destin des populations se joue toujours soit par des développements de longue durée, soit par des commotions brutales. Le fondateur de l’historiographie contemporaine, Fernand Braudel, disait cependant que la progression vers l’idéal de la liberté est « une des tendances majeures de l’histoire d’Europe » (Grammaire des civilisations, p. 362). La Révolution française présente à ce niveau un cas d’étude particulièrement complexe et difficile. S’agit-il d’une avancée spectaculaire, louable pour sa sagesse brave et mesurée, telle qu’on nous la présente habituellement ? Ou bien d’une manifestation exemplaire d’excès et de démence humaine ? La question peut se poser en termes généraux : la Révolution fut-elle bonne pour la France ? Ou elle peut se poser de façon plus précise : Fut-elle avantageuse pour les protestants français ? C’est à cette seconde question que répondra cet article.

La Révolution française jouit aujourd’hui, dans beaucoup de milieux protestants français, d’une considération égalée par nul autre événement historico-politique. En effet, presque chaque fois que l’on aborde la Révocation de l’Édit de Nantes de 1598 par Louis XIV en 1685 et que l’on souhaite mentionner la date à laquelle les réformés français recouvrèrent leurs droits, la plupart des auteurs précisent soigneusement que se fut un siècle plus tard à la Révolution. C’est omettre — par partisanerie ou par méconnaissance — que deux ans avant le déclenchement de la Révolution, le roi Louis XVI avait redonné un statut légal aux réformés du Royaume de France.

Le Temple-État, ou l’échec annoncé de la Révolution

Certes, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen accordait aux protestants une liberté de conscience et de culte théorique jusqu’alors inégalée depuis l’Édit de Beaulieu de 1576. Cependant les acquis de 1789 furent très éphémères. Dès 1790, le Comité ecclésiastique de l’Assemblée constituante accoucha de la Constitution civile du clergé et décréta que les prêtres & évêques romains étaient obligés de prêter un serment d’allégeance à ladite « constitution » qui plaçait l’Église catholique gallicane sous le contrôle direct de l’État français (à vrai dire l’imbriquait à l’appareil gouvernemental séculier de façon presque indissociable, sans commune mesure avec le césaropapisme & la cléricocratie de l’Ancien régime). Les réformés se retrouvèrent donc sous la juridiction ecclésio-étatique d’officiants civils d’obédience papale. Les réformés, bien que non astreints à assister au culte catholique, étaient par force de loi incorporés dans le système électoral des épiscopes romains. Assurément, cette situation incongrue, qui contrevenait de façon flagrante à la liberté d’association pourtant proclamée un an plus tôt, avait de quoi déranger aussi bien les calvinistes que les papistes.

Des « Droits de l’Homme » à la dictature néo-païenne

En 1792, la monarchie parlementaire se transforma en république instable et la révolution libertaire se mua rapidement en totalitarisme néo-païen cherchant à imiter l’Antiquité (culte déiste abstrait de l’« Être suprême » et culte athée naturaliste de la « Raison », conversion des églises en « Temples de l’Être suprême » ou en « Temples de la Raison et de la Philosophie », instauration officielle d’un nouveau calendrier post-chrétien et de nouvelles fêtes religio-civiques). Se furent les catholiques qui se révoltèrent. Le pays éclata en guerre civile quand des régions entières firent sécession du pouvoir parisien (Vendée, Bretagne, Berry, etc.). À Paris, le parti des Jacobins – les révolutionnaires les plus radicaux et les moins scrupuleux – opéra un coup d’État le 2 juin 1793, ouvrant la phase la plus sanglante de la Terreur.

Un défenseur des réformés à l’échafaud

Il importe de noter qu’au moment où la France bascula sous la poigne du jacobinisme, le Président de l’Assemblée nationale était le réformé Rabaut Saint-Étienne. Pasteur nîmois, issu d’une famille ayant connu l’angoisse et l’insécurité constante du Désert huguenot, Rabaut Saint-Étienne était un révolutionnaire relativement modéré qui comprenait que la Révolution avait été suffisamment loin. Il dénonçait son évolution en tyrannie et défendait ardemment les droits des réformés (avec le Marquis de La Fayette), debout au milieu de la tempête. Il prônait la décentralisation (l’autonomie régionale et locale) face aux Jacobins centralisateurs. Rabaut Saint-Étienne fut déclaré « ennemi du salut public » par les dictateurs jacobins, pourchassé, encerclé et appréhendé, puis finalement mis à mort le 5 décembre 1793. Ses deux frères, Rabaut-Pommier et Rabaut-Dupuis, également députés réformés, furent l’un emprisonné et l’autre traqué. Ainsi la Révolution française guillotina un grand défenseur des réformés français.

La Terreur déchristianisatrice comme mode de gouvernement

La Terreur jacobine mit en place un régime de déchristianisation visant autant le catholicisme que le protestantisme. La Suspension du culte fut presque irréellement décrétée par le pouvoir pagano-déiste jusqu’en 1795. La célébration (publique comme privée) de toute forme de culte chrétien devint complètement illégale sur toute l’étendue du territoire français. Les pasteurs et les prêtres furent forcés d’abdiquer officiellement leurs ministères spirituels. Sur 215 pasteurs, 117 refusèrent d’obtempérer. Il y eut des cas de courageuse résistance dans les départements du Drôme et de l’Ardèche.

Pendant la décennie suivant la chute de la Bastille (une prison de luxe où n’étaient pas logés dix hôtes), les coups d’État perpétrés par différentes factions révolutionnaires se succédèrent à un rythme effréné. Pendant cette difficile période, les réformés français étaient pris entre deux feux entre-déchirant la France, subissant alternativement la Terreur rouge (républicains athées) et la Terreur blanche (royalistes catholiques).

Une répercussion néfaste sur les Églises réformés

Pourquoi, dans ces circonstances accablantes, traite-t-on toujours la Révolution comme un phénomène mémorable marquant l’émancipation des réformés ? L’historien Daniel Robert signale qu’« En dépit de la complète liberté retrouvée [en 1795], la situation des églises réformées n’était en fait pas plus favorable – à beaucoup d’égards était même moins favorable – vers 1799 [coup d’État de Napoléon Bonaparte] que dix ans plus tôt. » Seule la massive propagande républicaine des XIXe et XXe siècles permet d’expliquer l’aura dont jouit la Révolution chez les protestants français actuels.

Au bout du compte, la seule bonne chose que la Révolution apporta au protestantisme français, c’est l’autorisation accordée aux descendants de la diaspora huguenote dispersée à travers le monde (en Hollande, en Afrique du Sud, en Angleterre, aux États-Unis, au Brandebourg où le quart de la population berlinoise était alors calviniste française) depuis la Révocation de revenir en France et d’y recevoir la nationalité française avec tous les droits (et les non-droits) que cela inclut. Or ce retour se préparait depuis 1738 et la politique républicaine en la matière s’inscrivait dans la continuité logique et chronologique de la politique royale.

Napoléon puis la IIIe République: les réformés étroitement surveillés

Après la Révolution, Napoléon Bonaparte légalisa définitivement le protestantisme avec le Concordat de 1801, tout en empêchant à l’Église réformée de s’organiser à l’échelon national avec les Articles organiques de 1802 (il voyait le système presbytéro-synodal – comparativement démocratique et décentralisé – comme un contre-pouvoir potentiel à son autorité). La IIIe République laïciste a maintenu cet interdit pesant sur les réformés pendant plus de trois décennies jusqu’à ce que la Loi de 1905 leur permette une marge de manœuvre moins inacceptable (tout en gardant les églises sous la sujétion stricte de l’État). En fin d’analyse, les réformés français ne doivent pas grand chose à la Révolution païenne et liberticide de Marat, Danton et Robespierre.

Racines idéologiques de l’absolutisme et de la Révolution: bonnet blanc et blanc bonnet

Si les effets de l’absolutisme et de la Révolution furent également désastreux pour les réformées, on peut se questionner à savoir si ces deux formes de tyrannie, furent, dans leur essence, identiques. L’Ancien régime est né de la volonté d’une moitié de la noblesse française qui refusait d’obéir à la moralité biblique (embrassée par l’autre moitié de la noblesse,  d’allégeance calviniste) et qui utilisa le catholicisme comme un subterfuge masquant ses mœurs licencieuses. C’est la rébellion contre Dieu qui fut le moteur de l’absolutisme : le roi François Ier subventionnait des prostituées avec le trésor d’État et les paradait avec des rubans à sa cour, le « Roi-Soleil » (Louis XIV) s’identifiait à la divinité païenne Apollon, l’ultra-débauché roi Louis XV attrapa des maladies vénériennes à force de fréquenter les putains. Idem pour la Révolution : là aussi l’homme déchu prétendit faire ses propres lois sans égard à Dieu afin de satisfaire ses pulsions immorales. En voulant contrôler les moindres parcelles de la vie humaine, l’Ancien régime se solda par une perte de contrôle culturel sous la forme du libertinage et du rococo. Similairement, la Révolution française fut (et est toujours), en juxtaposant les autoritarismes jusqu’à l’anarchie institutionnelle, malgré ses prétentions, l’héritière idéologique directe de l’absolutisme monarchique.

Les historiens réformés ripostent

Heureusement, la mauvaise historiographie qui engourdit intellectuellement la communauté réformée & évangélique commence à avoir du plomb dans l’aile depuis la fin du siècle dernier. Cela en partie grâce à l’œuvre collective Révolution et christianisme – Une appréciation chrétienne de la Révolution française (Lausanne, Éditions L’Âge d’Homme, 1992, 230 pages).

En voici la quatrième de couverture :

Un ouvrage tonifiant qui tranche avec la monotonie du consensus d’éloges officiels suscité par les célébrations du bicentenaire de la Révolution française. La tradition réformée en France s’est, depuis deux siècles, très largement engagée dans la voie ambiguë d’une complicité laïque avec la Révolution. Les études contenues dans ce livre – pour la plupart dues à des plumes protestantes – marquent un revirement historiographique capital. Ces historiens réformés ne perçoivent plus le phénomène révolutionnaire uniquement sous l’angle de la libération des Églises de la Réforme du joug persécuteur de l’alliance du trône et de l’autel, de la monarchie absolue et de l’Église catholique romaine. Ils ne considèrent plus la Révolution comme étant la marche triomphante du progrès des idées modernes. Sous des angles divers nos auteurs font clairement paraître la Révolution française et ses métastases dans le monde entier – phénomène fort différent de ses prédécesseurs anglais et américain – comme manifestant un caractère antichrétien. L’idéologie révolutionnaire est ici perçue comme l’expression d’une volonté religieuse, politique et culturelle qui cherche à s’affranchir du Dieu créateur et de ses lois. Car c’est le christianisme lui-même qui, avant tout autre, fit les frais de ce cataclysme spirituel. Par contraste avec l’action révolutionnaire, ces travaux démontrent explicitement que toute transformation féconde de la société doit nécessairement prendre le chemin d’un retour des hommes et des nations au respect de Dieu et de sa Parole.

La table des matières est engageante :

  • Préface | Pierre Chaunu
  • Le veau d’or révolutionnaire | Jean Brun
  • Sociologie de la Révolution | François G. Dreyfus
  • Lecture et déconstruction du mythe révolutionnaire | Jean-Marc Daumas
  • L’idéologie antichrétienne de la Révolution française | Pierre Courthial
  • La théorie de la Révolution française et l’idée de révolution chez Marx et Lénine | Marc Sherringham
  • La Russie et la Révolution française | Alain Besançon
  • La Révolution française et les révolutions | Jean-Marc Berthoud
  • La fin de l’esprit révolutionnaire | William Edgar
  • Les fondements de l’ordre social selon le Nouveau Testament | Peter Jones
  • Perspectives chrétiennes pour un monde en révolution | Udo Middelmann
  • Postface | Roger Barlier

Une numérisation trouée de ce livre est disponible sur Google Books. Vous pouvez également le commander sur Amazon.fr ou via la Bibliothèque réformée.

Si ces auteurs réformés français marquent un tournant avec leurs prédécesseurs nationaux, il faut rappeler que d’autres protestants européens avaient condamnés la Révolution française alors que celle-ci n’avais pas encore déchaînée toute sa folie meurtrière (l’épiscopalien irlandais Edmund Burke, les réformés néerlandais Wilhelm Bilderdijk et Hieronymus van Alphen) ou qu’elle dictait encore la donne dans l’espace politique européen (le luthérien allemand Friedrich Julius Stahl, le réformé néerlandais Groen van Prinsterer). Ce dernier soutenait qu’à l’esprit de la Révolution et à la devise : « Ni Dieu, ni Maître » doit être opposé l’esprit chrétien, l’esprit de la Réformation, l’esprit de la confession de la Vraie Foi : « Jésus-Christ est le Seigneur ». Groen van Prinsterer affirmait dans le huitième chapitre d’Apostasie et Révolution (1847) que « La Réformation n’a pas été la préparation mais bien plutôt l’antithèse véritable de la Révolution. » Et dans le premier tome des Archives de la Maison d’Orange-Nassau (1835) :

La Révolution part de la souveraineté de l’homme ; la Réformation de la souveraineté de Dieu. L’une fait juger la révélation par la raison ; l’autre soumet la raison aux vérités révélées. L’une débride les opinions individuelles ; l’autre amène l’unité de la foi. L’une relâche les liens sociaux et jusqu’aux relations domestiques, l’autre les resserre et les sanctifie. Celle-ci triomphe par les martyres ; celle-là se maintient par les massacres. L’une sort de l’abîme et l’autre descendit du ciel.

Des observateurs ont fait l’analyse suivante de la pensée de Groen van Prinsterer :

La Réformation comme antithèse de la Révolution

La Réformation serait-elle mère de la Révolution ? Pas du tout, dit Groen. En fait, la Réformation est l’antithèse même de la Révolution : la Réformation est fille de la Parole de Dieu et des six grands premiers Conciles œcuméniques ; la Révolution est la fille des Lumières du XVIIIe siècle, fille du rationalisme et de l’incrédulité.

À ce titre, il apparaît pour Groen qu’avant même d’être un phénomène politique et social, la Révolution est un phénomène religieux, une prise de position d’ordre philosophique et religieux à l’encontre du christianisme historique. Pour Groen, la Révolution est avant tout, non un bouleversement politique ou social, mais l’histoire de la philosophie irréligieuse, de l’incroyance systématique, qui détruisent fatalement les fondations de l’Église et de l’État, de la famille et de la société, et qui engendrent le désordre sans jamais aboutir à la vraie liberté. Le principe de cette Révolution, c’est le culte idolâtre de l’humanité, où l’homme ne reconnaît de souverain que lui-même, de lumière que sa raison, de règle que sa volonté.

Groen van Prinsterer n’était certainement pas un avocat du statu quo, il n’était pas opposé à certaines révolutions. Ainsi s’exprimait-il au milieu du XIXe siècle :

La situation de la France et de l’Europe appelait à grands cris une Réforme. Mais cette situation ne rendait ni désirable, ni même inévitable, le contraire d’une Réforme : une Révolution dans les idées fondamentales de l’ordre social, une Révolution anti-religieuse, renversant sous le nom d’abus, jusqu’aux institutions les plus utiles, et niant, sous le nom de préjugés, jusqu’aux principes les plus sacrés.

Faut-il donc renoncer aux espérances de 1789 ? Envelopper la liberté, l’égalité, la fraternité, la tolérance, l’humanité, le progrès dans une réprobation systématique ? N’y-a-t-il rien de vrai dans ces idées ? Il serait absurde de le supposer. Elles répondent, en partie, aux aspirations les plus nobles et aux désirs légitimes du cœur humain ; mais, pour assurer notre bonheur, il ne suffit pas de répandre à profusion les belles maximes, en les séparant de la vérité suprême qui seule peut les rendre efficaces. La Révolution qui les proclame les frappe de stérilité, ou, pour parler plus exactement, les dénature. Rameaux détachés de l’arbre évangélique, ces idées que la sève révolutionnaire empoisonne, ne portent que des fruits mortels. Mis au service d’une philosophie anti-chrétienne, la panacée ne fait qu’aggraver le mal au lieu d’amener la guérison.

Corruptio optimi pessima. Les grandes idées de 1789, passionnément accueillies et qui par leur contraste avec tant de petitesse et d’immoralité donnèrent à cette époque, tristement mémorable, une apparence de désintéressement et de grandeur, les idées de 1789, irréprochables en elles-mêmes et en rapport avec la source dont toute Vérité émane [c-à-d Dieu], devaient cependant, dans leur liaison avec l’incrédulité qui prédominait dans les esprits, devenir funestes. Elles devaient, précisément à cause de leur bonté relative, allumer un fanatisme qui se croirait en droit de tout immoler, pour parvenir à réaliser ses conceptions sublimes. Après avoir, en poursuivant des projets chimériques, même par des moyens atroces, produit les forfaits de la Terreur, cette obstination sanguinaire devait se briser contre un sceptre de fer. À la dictature de Robespierre devait définitivement succéder le régime arbitraire de Bonaparte.

[…]

L’écrivain qui a si admirablement popularisé, en Amérique et en Europe, les souvenirs des grands événements qui firent naître, sous les auspices d’un héros et d’un martyr, la République des Provinces-Unies, monsieur Lothrop Motley, proclame la différence entre les révolutions dans le sens ordinaire et la Révolution [française] dans l’acception exceptionnelle du mot, entre un déplacement de pouvoirs et un renversement de principes. Il montre, réunis dans un même amour des libertés nationales et historiques, Guillaume Ier, Guillaume II et Washington ; il oppose à la Révolution [française] systématiquement anarchique les révolutions salutaires et légitimes des Pays-Bas, de l’Angleterre et des États-Unis.

Source : Groen van PRINSTERER, Le Parti anti-révolutionnaire et confessionnel dans l’Église réformée des Pays-Bas, Amsterdam, 1860 ; cité par Pierre COURTHIAL,  « Un critique réformé de la Révolution française : Guillaume Groen van Prinsterer (1801-1876) », Revue Réformée, N° 155, juin 1988, p. 29-39.

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Complément : Le Génocide de Vendée – Série d’articles [Phileo Sophia]

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CarteZonesFederalistesRevolutionFrancaise

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Quelques commentaires :

  1. La laïcité étant un ordre idéologique conçu sur mesure pour favoriser les athées & agnostiques, les chrétiens n’ont pas à s’y conformer.
  2. L’Église de Dieu n’est pas un organe de l’État mais une institution indépendante qui ne doit accepter aucune ingérence séculière dans ses propres affaires.
  3. La seule personne à qui l’Église doit rendre des comptes, ultimement, c’est à son unique chef, Jésus-Christ, Fils de Dieu.

J’encourage les lecteurs à prendre connaissance des documents suivants pour mieux comprendre le contexte et les enjeux de la question du rapport entre Églises et État en France :

Or si le concordat napoléonien maintenait, dans une certaine mesure, en sujétion à l’État les Églises protestantes et catholiques (puisque c’est l’État qui sélectionnait et rémunérait les pasteurs et les évêques), la loi de 1905 institutionnalisa aussi une forme d’interférence étatique dans les affaires internes des Églises protestantes et catholiques en les forçant à se dupliquer en associations cultuelles (pour leur compliquer la vie et provoquer la dispersion de leurs ressources) ainsi qu’en usurpant leurs propriétés classées comme « bâtiments historiques » :

L’attribution des biens d’Église

Les articles 3 à 10 concernent les biens des établissements du culte, qui doivent donner lieu à un double inventaire pour distinguer ce qui appartient aux établissements (donc sera en principe attribué aux associations cultuelles) de ce qui appartient à l’État ou aux communes [vol légal et extorsion à grande échelle].

Les édifices des cultes

Les articles 12 à 17 de la loi concernent l’attribution des églises, presbytères, séminaires et facultés de théologie « mis à la disposition de la Nation » par le Concordat et les Articles organiques — cela après l’inventaire prévu. Ces édifices seront mis à la disposition des associations cultuelles, qui devront en assurer l’entretien. Les plus beaux édifices étaient classés « monuments historiques » par la loi de 1887, donc l’État et les communes devaient se charger de leur entretien ; un classement complémentaire était prévu (article 16).

La police des cultes [!]

Elle est détaillée dans les articles 25 à 36, et reste en vigueur. Les sonneries des cloches sont réglées par arrêté municipal, de même que les processions ; il est interdit de tenir des réunions politiques dans les locaux servant à un culte ; l’enseignement religieux des enfants de 6 à 13 ans doit être donné en dehors des heures de classe [et pour ceux faisant l’école-maison ?!] ; tout insigne ou emblème religieux est interdit sur les monuments publics. Des amendes sont prévues pour les infractions.

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« Ce qui a fait la force de la civilisation occidentale, c’est qu’on reconnaissait qu’au-dessus des lois des États, il y a la loi de Dieu. » — Pierre Courthial, ex-doyen de la Faculté d’Aix-en-Provence

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