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Folio du Codex Washingtonensis III (W032) copié vers l’an 400, conservé au Freer Gallery of Art de la Smithsonian Institution à Washington (D.C.), portant le texte de Marc 5:26 à 5:37 où il transitionnerait, au v. 31, du texte-type occidental au texte-type césaréen

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Nous avons vu, précédemment, en quoi consiste la critique textuelle du Nouveau Testament, et pourquoi cette démarche érudite est tout à fait conforme à l’orthodoxie réformée confessionnelle historique et à l’héritage de la foi évangélique traditionnelle. Nous nous penchons maintenant sur l’identité des textes-types du N.T.

Dans leur analyse comparative des 6000+ manuscrits grecs du Nouveau Testament, les spécialistes de la transmission du N.T. regroupent les différents manuscrits – ou plus exactement les différents textes portés par ces manuscrits – en des catégories (qu’on appelle des textes-types) en fonction de leurs caractéristiques textuelles et para-textuelles communes.

Ces textes-types dans les manuscrits grecs antiques et médiévaux sont au nombre de quatre : Il s’agit du texte-type alexandrin, du texte-type byzantin, du texte-type occidental et du texte-type césaréen. (Quant aux éditions imprimées modernes du N.T. grec, il s’agit du texte standard – aussi appelé texte critique – qui est surtout basé sur le texte-type alexandrin, du texte dit majoritaire qui est dérivé du texte-type byzantin, et du soi-disant “texte reçu” qui est surtout un mélange du texte byzantin avec des éléments de la Vulgate latine.)

Une petite mise en garde préalable s’impose avant de se lancer dans l’étude des textes-types néotestamentaires : Cette classification quadripartite ne doit jamais nous faire perdre de vue que dans leur globalité, les textes de ces quatre textes-types sont identiques à environ 90 %. Leurs divergences mutuelles ne concernent qu’approximativement 10 % du texte, et parfois encore moins (ainsi, le texte standard/alexandrin et le texte majoritaire/byzantin se corroborent à ≈ 94-96 %).

Ces texte-types ne sont pas des ensembles monolithiques

Cette classification en quatre textes-types ne signifie pas que chacun de ces textes-types forme un groupe parfaitement homogène, rigide et monolithique. Au contraire, il existe beaucoup de variantes textuelles à l’intérieur de chaque texte-type ; ils partagent simplement assez de caractéristiques textuelles communes pour être considérées comme appartenant au même texte-type.

Malgré cette classification quadripartite, certains manuscrits qui sont en général représentatifs d’un texte-type peuvent occasionnellement contenir des variantes en général associées à un autre texte-type. Ce phénomène est parfois aléatoire, et parfois « organisé ». Par exemple, sur un total de 100 variantes dans un manuscrit fictif ABC-123, 80 % des variantes pourraient être caractéristiques du texte-type alexandrin et être réparties proportionnellement dans tout ce manuscrit, 10 % des variantes pourraient être caractéristiques du texte-type occidental et être dispersées dans tout ce manuscrit, et le 10 % des variantes résiduelles pourraient être caractéristiques du texte-type byzantin et être concentrées dans le dernier quart du manuscrit.

En outre, certains manuscrits sont des assemblages de différents « blocs ». À titre d’exemple, dans un manuscrit composite fictif DEF-456, les Évangiles pourraient être représentatifs du texte-type alexandrin, les Actes et les épîtres pauliniennes pourraient être représentatifs du texte-type occidental, puis les épîtres générales et l’Apocalypse pourraient être représentatifs du texte-type byzantin. Ou encore, dans un manuscrit fictif XYZ-789, les Évangiles de Matthieu et de Marc pourraient être du texte-type césaréen, puis les Évangiles de Luc et de Jean pourraient être du texte-type occidental. Ce phénomène est appelé « mixité de blocs » (block mixture).

Le texte “alexandrin” vient d’Asie Mineure et non d’Égypte

Il importe de comprendre que les noms donnés par convention à ces divers textes-types ne nous renseignent pas nécessairement sur leur véritable origine géographique respective. Ainsi, le vocable « alexandrin » (qui est attribué au texte-type réunissant des anciens papyri du tournant du IIIème siècle et les grands onciaux du début-milieu du IVème siècle) se nomme ainsi essentiellement parce que le 1er manuscrit de ce courant à devenir passablement bien connu en Occident moderne – à savoir le Codex Alexandrinus (A02) arrivé à Londres entre 1621 et 1627 – fut donné au roi d’Angleterre et d’Écosse par un ex-patriarche grec d’Alexandrie en Égypte, Cyrille Loukaris. Celui-ci avait trouvé cet ancien codex dans la bibliothèque patriarcale d’Alexandrie, mais ignorait qu’il provenait à l’origine de Constantinople et qu’il n’avait été apporté en Égypte qu’en 1308.

En réalité, les 1ères attestations textuelles connues de variantes caractéristiques de tous les textes-types grecs se retrouvent dans des papyri découverts en Égypte où ils ont survécus à cause du climat désertique très sec. Ces papyri des II-IIIèmes siècles, ainsi que les citations patristiques de Clément d’Alexandrie et d’Origène d’Alexandrie, prouvent que des variantes de tous les textes-types néotestamentaires étaient connues en Égypte dès l’époque la plus reculée. Si le texte-type alexandrin est prédominant parmi ces sources, c’est simplement parce que c’est ce type qui est le plus ancien et qui transmet – en général – le plus fidèlement le texte original du Ier siècle.

Pour le N.T., il n’existe pas la moindre preuve d’une recension textuelle qui aurait prétendument été orchestrée par le catéchète Pantène d’Alexandrie (natif de Sicile, fl. 180-192, † c. 216) ou par le mystérieux grammairien Hésychios d’Alexandrie (qui n’était même pas chrétien et dont on ignore s’il vécut au IVème et/ou au Vème s.), recension imaginaire dont le texte-type dit alexandrin serait supposément le résultat. Cette allégation colportée par les adeptes du texte reçu et du texte majoritaire est un stratagème rhétorique malhonnête pour tenter de faire naître le texte-type dit alexandrin en Égypte et ainsi de le lier à l’ésotérisme gnostique puis à l’hérésie arienne. De surcroît, ce stratagème rhétorique est absurde vu que le gnosticisme et l’arianisme étaient répandus dans presque tout l’Empire romain, pas juste en Égypte.

Les faits sont têtus : La proximité textuelle entre P75 et B03 dans les Évangiles de Luc & Jean, entre P46 et B03 dans les Épîtres pauliniennes non-pastorales, entre P66 et 01 dans l’Évangile de Jean, entre P64+67 & P77+103 et 01 dans l’Évangile de Matthieu, ainsi qu’entre P13 et B03 de même qu’entre P46 et 01 dans l’Épître aux Hébreux, etc., invalident chronologiquement la thèse invraisemblable d’une recension alexandrine par le païen Hyséchios. (Neville Birdsall, “Textes et versions”, Grand Dictionnaire de la Bible, Éditions Excelsis, 2010, p. 1662-1663 ; Philip Comfort, “The Most Reliable Witnesses”, New Testament Text and Translation Commentary, Tyndale House Publishers, 2008, p. XVI-XXIII).

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L’origine asiate / ionienne / ouest-anatolienne du texte-type dit alexandrin expliquée par Peter Rodgers (pasteur épiscopalien et professeur de N.T. au Fuller Theological Seminary à Sacramento en Californie) :

Le texte “occidental” n’est pas né en Occident

Semblablement, le vocable « occidental » est donné au texte-type portant ce nom parce que les deux 1ers manuscrits de ce courant à devenir passablement bien connus en Europe moderne – à savoir le Codex Bezæ (D05) et le Codex Claromontanus (D06) – furent respectivement dénichés par Théodore de Bèze à Lyon et à Clermont-de-l’Oise en France (c-à-d en Occident) au XVIème siècle. Toutefois, nous savons aujourd’hui que même si le Codex Bezæ fut vraisemblablement copié en Gaule méridionale au début du Vème siècle – probablement à Lyon ou à Vienne (Isère), ou possiblement à Clermont-Ferrand (comme le spéculait Bèze) – sa filiation textuelle remonte à Smyrne en Ionie (c-à-d en Orient) vers la fin du IIème siècle. Selon l’hypothèse la mieux accréditée, l’exemplaire depuis lequel aurait été copié D05 aurait été apporté dans la vallée du Rhône par le 1er pasteur de l’Assemblée chrétienne de Lyon, Pothin de Lyon († 177), natif d’Asie Mineure qui fut envoyé en Gaule par Polycarpe de Smyrne, ou sinon par son 2ème pasteur, Irénée de Lyon († 202), lui aussi un émule asiate de Polycarpe.

Certes, le Codex Claromontanus (D06) fut copié en Italie méridionale à la fin du Vème siècle, et deux autres importants témoins du texte-type dit occidental, le Codex Augiensis (F010) et le Codex Boernarius (G012), copiés au IXème siècle, viennent respectivement de l’Abbaye de Reichenau et de l’Abbaye de St-Gall en Germanie méridionale. Cela paraît situer ce texte-type en Occident. Cependant, la Vieille syriaque (version des Évangiles, Actes et Épîtres de Paul en araméen antérieure à la Peshitta) est un témoin du texte-type dit occidental ; elle confirme l’ancrage de ce texte-type en Orient environ 150 ans avant la production de D06 et un bon demi-millénaire avant la production de F010 et G012. (C.-B. Amphoux et J.-C. Haelewyck, Manuel de critique textuelle du Nouveau Testament, Éditions Safran, 2014, p. 21-22, 28-29, 102-103 et 272-273 ; Robert Waltz, “Manuscript F (010)” et “Manuscript G (012)”, Encyclopedia of Textual Criticism, en ligne).

Tableau-synthèse sur l’origine géo-chronologique des textes-types du N.T.

Voici un tableau synthétisant l’information basique sur l’origine géographique et chronologique des divers textes-types du Nouveau Testament grec (appuyé par moult références bibliographiques) en une seule page :

Ce tableau est aussi accessible sur Calaméo ou en téléchargement direct ici.

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Quelques précisions s’imposent :

  • Pour les fins de ce tableau, « centres d’origine » signifie aussi « centres de diffusion » (j’ai manqué d’espace pour l’ajouter). Ainsi, par exemple, nous savons par l’intermédiaire de la Vetus Latina (« Vieille latine », c-à-d la version de la Bible en latin antérieure à la traduction de la Vulgate par Jérôme de Stridon et Rufin le Syrien) qui était utilisée par des Pères de l’Église au Maghreb comme Tertullien de Carthage, Cyprien de Carthage en Augustin d’Hippone, que le texte-type occidental grec a été diffusé dans – et depuis – l’Afrique du Nord, puisque cette Vetus Latina fut traduite à partir de manuscrits grecs du texte-type occidental.
  • Ce tableau présuppose l’axiome selon lequel le lieu de découverte d’un manuscrit ou le lieu de popularité d’un texte-type (ci-après « t-t ») n’est pas une preuve déterminante de l’origine géographique du t-t concerné. En effet, les gens, les livres et les idées circulaient en Antiquité gréco-romaine comme ils circulent aujourd’hui. Ainsi, la découverte des Papyrus 66 & Papyrus 75 ayant un t-t alexandrin en Égypte, de même que l’utilisation du t-t alexandrin par Athanase d’Alexandrie au IVème siècle puis par Cyrille d’Alexandrie au Vème siècle, ne prouvent pas que ce t-t provienne initialement d’Égypte. Mais dans ce cas, ce tableau se contredit-il en indiquant que le t-t alexandrin proviendrait notamment de Constantinople car A02 est retraçable jusqu’à cette cité ? Hé bien pour être franc, puisque ce ms est l’un des principaux témoins de ce t-t, il m’a semblé que je devais le mentionner en quelque part dans le tableau, et l’indiquer tel que je l’ai fait est le seul moyen que j’ai trouvé tout en faisant tenir le tableau annoté sur une seule page au format légal nord-américain (8½×14 pouces).
  • Similairement, y-a-t’il incohérence dans l’indication que le t-t césaréen puise notamment ses origines dans l’Oasis du Fayoum en Égypte car le Papyrus 45 et le Codex Washingtonensis III (W032) y ont été déterrés ? Honnêtement, peut-être ; cette indication se motive par le fait que le t-t césaréen est de loin celui pour lequel nous disposons du moins d’informations faisant consensus (son existence même est contestée par Kurt & Barbara Aland, mais ceci est exagéré). Plutôt que de ne rien dire, mieux vaut dire le peu que nous savons.

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Parmi les plus de 6000 manuscrits grecs du Nouveau Testament actuellement répertoriés à travers le monde et conservés dans des bibliothèques publiques (nationales, municipales, etc.) ou des bibliothèques privées (universitaires, muséales, monastiques, etc.), on dénombre environ 450 000 variantes textuelles (c’est-à-dire des variations ou divergences dans le texte). Sur un texte de base d’environ 140 000 mots, cela fait en moyenne environ trois variantes par mot ! Toutefois, la très vaste majorité de ces variantes (plus des ¾) s’expliquent par des facteurs tels que la grande souplesse grammaticale de la langue grecque – elles sont tellement insignifiantes qu’elles ne sont souvent même pas traduisibles dans d’autres langues telles que le français et l’anglais – ou encore comme étant des coquilles non-sens pouvant aisément être écartées.

En outre, il faut garder à l’esprit que ces 6000+ manuscrits néotestamentaires totalisent environ 2.7 millions de pages (pour une longueur moyenne d’environ 450 pages par manuscrit), et que lorsque ces ≈ 450 000 variantes sont réparties sur la masse réelle des manuscrits (plutôt que sur un unique texte de base tapuscrit), il n’y a en moyenne qu’une variante par six pages de texte du N.T. Vu sous cet angle, c’est beaucoup moins préoccupant.

Il subsiste, néanmoins, une proportion significative de ces variantes textuelles – aussi appelées leçons au sens technique – qui sont porteuses d’un sens différent. La discipline ayant pour objectif de démêler ces variantes et de déterminer celles qui correspondent au texte original se nomme la basse critique ou critique textuelle (ces deux expressions synonymiques désignant la même démarche).

Définir et décrire le champ d’étude

La basse critique se définit comme étant la « méthode d’analyse de l’Écriture qui traite du texte lui-même de l’Écriture par l’étude des diverses variantes dans les manuscrits anciens » (Paul Enns, Introduction à la théologie, Éditions CLÉ, 2009, p. 708). Cette basse critique se distingue de la haute critique, qui « est le terme consacré pour la détermination de la date, de l’auteur et de la structure d’un livre au moyen de l’examen de preuves internes et externes » (Jacques Blocher et al., Nouveau Manuel de la Bible, Groupes bibliques universitaires, 1994, p. 48).

La critique textuelle se définit comme suit : « La critique textuelle constitue une discipline à part entière […]. Son objet est limité aux phénomènes propres à la copie des textes. Son but est de déterminer, d’après les documents qui sont en notre possession, la forme de texte la plus primitive, c-à-d la plus proche de l’original aujourd’hui perdu. » (Émile Nicole, “Critique biblique”, Grand Dictionnaire de la Bible, Éditions Excelsis, 2010, p. 383).

Voici un schéma simplifié de la diffusion des copies manuscrites du N.T. et de la transmission des variantes textuelles pendant les premiers siècles de l’Ère chrétienne :

Voici quelques éléments explicatifs supplémentaires :

« C’est, qu’en effet, la copie d’un texte aussi long qu’un Évangile représente un véritable tour de force et il peut fort bien s’y glisser des erreurs. Mais la comparaison des manuscrits et la connaissance des méthodes de travail des scribes permettent de dater les versions et de parvenir ainsi au texte authentique. Ce n’est pas une mince affaire, lorsqu’on dispose de milliers de manuscrits. Néanmoins, ceux qui s’y sont consacrés reconnaissent que le Nouveau Testament s’est remarquablement [bien] conservé (nettement mieux que la plupart des grands textes classiques [de l’Antiquité gréco-romaine]). » (Leon Morris, “Les Évangiles et la critique contemporaine”, La Bible déchiffrée : Introduction à la lecture de la Bible, Ligue pour la lecture de la Bible, 1977, p. 531).

« Il ne s’agit pas de ‹ critique › au sens courant d’appréciation défavorable, mais au sens d’analyse attentive. […] Il y a presque deux mille ans, les évangélistes rédigèrent en grec quatre Évangiles. Nous n’avons pas les manuscrits originaux nés de la plume des évangélistes, ni d’ailleurs aucun original d’aucun livre du N.T. Ce que nous avons, ce sont beaucoup de copies manuscrites en grec réalisées pendant quelque mille quatre cents ans, entre 150 [ou un peu plus tôt] et l’invention de l’imprimerie [vers 1454]. Souvent, mais généralement sur des points de détail, ces copies diffèrent entre elles en raison de fautes ou de modifications des copistes. La comparaison des différences entre les copies grecques (aussi bien qu’entre d’anciennes traductions et citations du N.T.) est appelée critique textuelle. » (Raymond Brown, Que sait-on du Nouveau Testament ?, Bayard Éditions, 2000, p. 56-57).

« Au fil du temps, la transmission du texte a donc souffert d’erreurs accidentelles ou de changements volontaires, qui l’ont éloigné du texte original […]. La critique textuelle désigne la démarche par laquelle on recherche la formulation originale de l’auteur en comparant les diverses copies et traductions du texte biblique. Il ne s’agit pas de trouver des erreurs mais d’évaluer les formes connues du texte aujourd’hui. […] On n’a aucun doute sur la majeure partie du texte biblique. Là où des variantes – [c-à-d] des différences entre les copies existantes – apparaissent, la formulation originale peut généralement être déterminée avec un haut degré de certitude, grâce aux manuscrits disponibles. […] La présence d’erreurs textuelles n’est pas une raison de considérer la Bible comme non fiable. » (Collectif, “La critique textuelle”, Bible Segond 21 avec notes d’étude archéologiques et historiques, Société biblique de Genève, 2022, p. 1043).

Les différents témoins et leurs abréviations standardisées

« Pour plus de clarté on peut subdiviser les principales sources [appelées ‹ témoins textuels › au sens technique] utilisées pour l’établissement du texte du Nouveau Testament en trois catégories :
1. Plus de 5300 [6000] manuscrits (des copies du Nouveau Testament conservées de façon plus ou moins complète ou des portions de celui-ci) rédigés en grec, dont le plus ancien (le papyrus 52 contenant Jn 18.31-33, 37-38) est ordinairement daté d’environ 125 ap. J.-C. Comme les plus anciens d’entre eux sont écrits en onciales ou majuscules (d’abord sur papyrus, puis sur parchemin) et les manuscrits ultérieurs (à partir du IXe siècle) en minuscules, on distingue des ‹ papyrus ›, des ‹ onciaux › et des ‹ minuscules › [ou ‹ cursifs ›].
2. Des centaines de copies des premières traductions [appelées ‹ versions › au sens technique] dans les langues du bassin méditerranéen (latin, syriaque, copte, etc.) qui remontent jusqu’au IIe siècle.
3. Une foule de citations bibliques dans les écrits des auteurs de l’Église ancienne (des ‹ Pères de l’Église ›) qui fournissent une aide importante pour situer géographiquement et chronologiquement les variantes textuelles trouvées dans les manuscrits. » (Heinrich von Siebenthal, “Nos traductions du Nouveau Testament ont-elles une base textuelle fiable ?”, Théologie évangélique (FLTÉ), 2:3, 2003, p. 226-227).

Afin de faciliter leur tâche, les praticiens de la critique textuelle attribuent des abréviations standardisées (sigles, numéros, etc.) aux manuscrits et autres témoins textuels avec lesquelles ils travaillent. Une connaissance basique de l’identité, de l’abréviation et des caractéristiques sommaires des principaux témoins textuels du N.T. est un préalable obligé pour quiconque veut vraiment se débrouiller dans le domaine de la critique textuelle du N.T. J’ai justement l’intention de m’exprimer un utilisant ces abréviations dans mes futurs articles de la présente série sur ce thème. Malgré que ce méandre d’abréviations codifiées soit très rebutant pour les débutants, une fois qu’on maîtrise passablement bien les principales d’entre-elles, on se rend vite compte qu’elles sont fort utiles car elles permettent de s’exprimer avec beaucoup plus de simplicité !

La plupart des dictionnaires bibliques ou des encyclopédies théologiques contiennent au moins un noyau de renseignements essentiels sur l’histoire du texte biblique et la critique textuelle s’y rapportant (je recommande, par exemple, l’article de Jacques Buchhold intitulé “Manuscrits et texte du Nouveau Testament” paru dans La foi chrétienne et les défis du monde contemporain, Éditions Excelsis, 2013, p. 214-219). Pour le bénéfice des internautes n’ayant pas accès à de telles ressources en format papier, je reproduit ci-dessous quelques extraits d’ouvrages de référence en cette matière.

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Informations élémentaires sur les mss onciaux des Évangiles venant de la “Liste des manuscrits grecs du N.T. en lettres onciales et des manuscrits des anciennes versions” figurant dans le Nouveau Testament d’Edmond Stapfer (1889, p. 19-35) traduit par ce philologue & pasteur réformé français (qui fut doyen de la Faculté de théologie protestante de Paris) via le texte de base grec établi par le bibliothécaire luthérien allemand Oscar von Gebhardt en 1886 :

(N.B. 347 folios du Codex Sinaïticus (01) sont conservés à la British Library de Londres depuis 1933 ; 43 folios sont conservés à la Universitätsbibliothek Leipzig en Haute-Saxe depuis 1845 ; 12 folios demeurent au Monastère de Sainte-Catherine du Sinaï en Égypte où ils furent découverts en 1975. Quant au Codex Alexandrinus (A02), il n’est en fait un représentant du texte-type dit alexandrin que dans les Actes, les Épîtres et l’Apocalypse ; dans les Évangiles il est plutôt un représentant du texte-type byzantin, mais d’un stade primaire de ce type car il ne contient pas des insertions textuelles plus tardives comme la pericope adulteræ. Nous étudierons en détail ce phénomène des textes-types dans un article ultérieur de la présente série.)

Certaines abréviations provenant du Nestle-Aland Greek-English New Testament (pages liminaires) publié par la Société biblique allemande en 1985 (portant le texte de base grec NA26 édité en 1979 par l’Institut de recherche néotestamentaire de Münster en Westphalie) :

Certaines abréviations provenant du Greek New Testament (pages liminaires) publié par la Société biblique allemande à Stuttgart au Würtemberg en 1998 (portant le texte de base grec UBS4 édité en 1993 par l’Alliance biblique universelle) :

Les abréviations des corrections scribales dans les manuscrits expliquées par le professeur & théologien réformé étatsunien Benjamin Breckinridge Warfield (1851-1921) dans son livre An Introduction to the Textual Criticism of the New Testament paru en 1886 (p. 48-49) :

Ressources additionnelles

Voici en outre quelques liens vers du contenu gratuit en français sur la toile permettant d’acquérir ou de peaufiner cette culture générale :

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Pour les internautes préférant le format audiovisuel, voici un assez bon vidéo d’introduction à la critique textuelle en français (je n’endosse pas certains des autres vidéos adventistes de Theoloji, mais celui-ci est correct) :

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Pour les internautes maîtrisant l’anglais, je recommande ces trois séries de webinaires sur la critique textuelle du Nouveau Testament, que voici en ordre de complexité croissante…

{1} “How We Got the Bible” (Finnegan)

Sean Finnegan est un pasteur unitarien conservateur dans l’État de New York. Sachez toutefois que dans cette série de 24 épisodes (dont seuls les épisodes 6 et suivants portent sur le N.T.), il s’en tient à une ligne orthodoxe (pas anti-trinitaire) jusqu’à l’épisode 18 inclusivement.

Hyperlien direct vers la série sur YouTube.

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{2} “Introduction to NT Textual Criticism” (Snapp)

James Snapp est un pasteur évangélique en Indiana, un blogueur assidu sur The Text of the Gospels ainsi qu’un défenseur convaincu de l’authenticité de la finale longue de l’Évangile selon Marc (Mc 16:9-20).

Hyperlien direct vers la série sur YouTube.

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{3} “Introduction to New Testament Textual Criticism” (Wallace)

Daniel Wallace est un spécialiste du grec antique, un professeur d’études néotestamentaires au Dallas Theological Seminary (DTS) au Texas, ainsi que le directeur-exécutif du Center for the Study of New Testament Manuscripts (CSNTM).

Hyperlien direct vers la série sur YouTube.

Hyperlien vers la série sur BiblicalTraining.org (version intégrale – 36 épisodes).

Hyperlien vers la série sur BiblicalTraining.org (version condensée – 6 épisodes).

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« Faire preuve de scepticisme quant au texte final du Nouveau Testament, c’est permettre à toute l’Antiquité classique de sombrer dans l’obscurité, car il n’existe aucun [autre] document de cette période ancienne qui bénéficie d’un témoignage bibliographique aussi [bien] attesté que le Nouveau Testament. » — John Warwick Montgomery, History and Christianity, 1971, p. 29

« J’ose même dire que ce grand nombre de variétés [dans les manuscrits grecs du N.T.] leur doit donner plus d’autorité que s’il n’y en avait aucune. Car il est impossible qu’un livre qui a passé par tant de mains demeure toujours le même, à moins qu’on ne l’ait corrigé [c-à-d qu’on ait fait une *recension* sélective], et qu’on ait dans la suite suivis exactement cette correction [c-à-d cette recension], comme il est arrivé aux juifs à l’égard du texte hébreu du Vieux Testament. Il est avantageux à un livre qu’il y en ait plusieurs exemplaires différents, afin qu’on puisse mieux juger des véritables leçons. Et c’est en quoi on doit préférer les livres du Nouveau Testament à la plupart des autres, parce que la religion chrétienne ayant été répandue en tant de différents pays, chaque nation en a eu des copies ou des versions. » — Richard Simon, Histoire critique du texte du N.T., 1689, p. 338

« Ce sont ces différentes copies sur lesquelles nous devons aujourd’hui nous régler, puisque nous n’avons plus le premier Original. On cherchera donc le plus exactement qu’il sera possible les exemplaires grecs manuscrits et même les plus anciennes versions [c-à-d traductions] qui ont été faites sur le grec. Il ne faut point s’appuyer sur une édition grecque plutôt que sur une autre, si elle n’est appuyée sur de meilleurs manuscrits. » — Richard Simon, Histoire critique du texte du N.T., 1689, p. 338

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